L’article 68(1) de la Loi de l’impôt sur le revenu (LIR) du Canada permet à une société acquéreuse d’augmenter la valeur des actifs d’une société cible, notamment les immobilisations non amortissables, dans le cadre d’une transaction d’acquisition. Cette technique est souvent désignée sous le terme de “coût majoré” ou “bump up”, et elle est utilisée pour optimiser la situation fiscale de l’acquéreur en permettant l’amortissement de certains actifs qui, autrement, ne seraient pas amortissables ou en bénéficiant de réductions d’impôts sur le long terme. Cependant, cette approche comporte des règles complexes et des conditions spécifiques qu’il convient de comprendre et de respecter pour éviter toute requalification par l’Agence du revenu du Canada (ARC).
Principe de la Technique du Coût Majoré
La technique du coût majoré (bump up) permet à l’acquéreur d’augmenter la valeur fiscale de certains actifs détenus par la société cible, notamment les immobilisations non amortissables telles que des terrains ou des goodwill (écart d’acquisition), lorsque ces actifs sont transférés à la société acquéreuse. Par exemple, si une société cible détient des biens non amortissables, tels que des terrains, et que ces biens sont transférés à la société acquéreuse, l’acquéreur peut augmenter la valeur fiscale de ces actifs à leur juste valeur marchande au moment de l’acquisition, sous réserve de respecter les règles spécifiques de l’article 68(1) LIR.
Cela permet à la société acquéreuse de récupérer de manière plus rapide le coût des actifs par des amortissements ou de réduire les gains en capital imposables au moment de la vente des actifs. Cette stratégie est particulièrement avantageuse dans les transactions où la société acquéreuse souhaite maximiser les avantages fiscaux liés à l’acquisition de la société cible.
Les Conditions d’Application de l’Article 68(1)
Afin de bénéficier de la technique du coût majoré en vertu de l’article 68(1) de la LIR, plusieurs conditions doivent être remplies. Tout d’abord, l’acquisition doit être réalisée par une société acquéreuse qui prend le contrôle de la société cible. Cette acquisition peut se faire par achat direct ou par fusion, mais dans tous les cas, l’acquéreur doit prendre le contrôle direct des actifs de la cible.
Ensuite, l’élément central de la technique du coût majoré est le transfert des actifs non amortissables de la société cible vers la société acquéreuse. Lorsque ce transfert est effectué, l’acquéreur peut majorer la valeur de ces actifs à leur juste valeur marchande à la date de l’acquisition. Cependant, le montant de cette augmentation doit être effectué dans le cadre des règles définies par l’ARC, qui stipule que la majoration ne peut pas excéder certaines limites.
Application aux Immobilisations Non Amortissables
L’application de la technique du coût majoré est particulièrement utile lorsqu’il s’agit d’immobilisations non amortissables, telles que des terrains ou des goodwill. Ces types d’actifs, bien qu’essentiels pour l’activité de l’entreprise, ne peuvent généralement pas être amortis aux fins de l’impôt, ce qui limite la capacité de l’acquéreur à récupérer leur coût sur une période de temps.
En augmentant la valeur fiscale de ces actifs lors du transfert, l’acquéreur peut bénéficier de plusieurs avantages. Par exemple, dans le cas des terrains, bien que ces actifs ne soient pas amortissables, une majoration de leur valeur permet à l’acquéreur de réaliser une réduction d’impôt au moment de la vente ou de la disposition future de ces biens. Si ces actifs sont ensuite vendus, l’acquéreur pourra potentiellement réduire l’impôt sur les gains en capital en fonction de la nouvelle valeur fiscale majorée.
Le goodwill, de son côté, est un autre type d’actif non amortissable qui bénéficie particulièrement de la technique du coût majoré. Lorsqu’un acquéreur reprend le contrôle d’une société et que cette dernière possède un goodwill, l’acquéreur peut majorer la valeur fiscale du goodwill à sa juste valeur marchande, ce qui permet d’amortir cette valeur sur une période étendue et ainsi de réduire l’impôt sur les revenus futurs.
Les Avantages de la Technique du Coût Majoré
L’avantage principal de la technique du coût majoré réside dans la possibilité de déduire des amortissements sur des actifs qui, autrement, ne seraient pas amortissables. Par exemple, en majorant la valeur d’un actif non amortissable tel qu’un terrain ou un goodwill, l’acquéreur pourra récupérer le coût de cet actif par des amortissements fiscaux ou en réduisant l’impôt sur les gains en capital lors de la vente ultérieure de l’actif.
En outre, cette technique permet de rationaliser les avantages fiscaux dans les transactions d’acquisition en réduisant le fardeau fiscal global de la société acquéreuse. Elle améliore la rentabilité des investissements en réduisant les impôts futurs, ce qui est particulièrement important dans les transactions à fort impact fiscal.
Les Risques et Limitations
Malgré ses avantages, l’utilisation de la technique du coût majoré comporte certains risques et limitations. La principale limite réside dans les conditions strictes imposées par l’ARC pour éviter tout abus de cette disposition. Par exemple, l’ARC peut limiter la majoration du coût fiscal à un montant qui ne dépasse pas la juste valeur marchande des actifs au moment de l’acquisition.
De plus, il existe des restrictions sur la manière dont ces actifs peuvent être transférés. Dans certains cas, si le transfert d’actifs est perçu comme un transfert fictif ou sans substance économique réelle, l’ARC peut contester l’application de la technique du coût majoré et réévaluer la transaction.
Enfin, la mise en œuvre de la technique du coût majoré nécessite une planification fiscale minutieuse. Il est essentiel que les conseils juridiques et fiscaux accompagnent l’acquéreur dans le processus d’acquisition pour s’assurer que toutes les conditions sont respectées et que la transaction respecte les règles fiscales en vigueur.
Conclusion
La technique du coût majoré (bump up) en vertu de l’article 68(1) de la Loi de l’impôt sur le revenu offre des avantages fiscaux considérables dans le cadre des acquisitions d’entreprises, notamment en ce qui concerne les immobilisations non amortissables telles que les terrains et le goodwill. Cette approche permet d’augmenter la valeur fiscale de ces actifs, facilitant ainsi leur amortissement et réduisant l’impôt sur les gains en capital. Toutefois, son application doit être effectuée avec précaution, en tenant compte des conditions et restrictions imposées par l’ARC, et en s’assurant que la transaction respecte toutes les exigences fiscales pour éviter tout redressement. Une planification fiscale adéquate et une consultation avec nos conseillers fiscaux sont essentielles pour tirer pleinement parti de cette stratégie tout en respectant les règles fiscales canadiennes.