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Le fractionnement du revenu est une stratégie fiscale qui permet de répartir les revenus d’un contribuable entre les membres de sa famille afin de réduire la charge fiscale globale. Bien qu’il s’agisse d’une stratégie couramment utilisée pour minimiser les impôts, elle est soumise à des règles strictes, notamment les règles d’attribution, qui visent à empêcher les abus. Dans cet article, nous vous expliquons comment fonctionne le fractionnement du revenu, quelles sont les règles d’attribution à respecter, et comment vous pouvez optimiser votre situation fiscale tout en restant conforme à la loi.

1. Qu’est-ce que le fractionnement du revenu ?

Le fractionnement du revenu consiste à répartir les revenus imposables entre plusieurs membres de la famille, généralement ceux qui se trouvent dans des tranches d’imposition inférieures. Par exemple, un contribuable à revenu élevé pourrait transférer une partie de ses revenus à son conjoint ou à ses enfants, ce qui permet de réduire l’impôt total à payer puisque ces membres de la famille seront imposés à un taux inférieur.

Le fractionnement peut s’appliquer à différents types de revenus, notamment les revenus d’investissement, les dividendes, et les gains en capital. Toutefois, ce type de stratégie est encadré par des règles strictes pour éviter que les contribuables n’abusent de ce mécanisme.

2. Les règles d’attribution : freins au fractionnement du revenu

Les règles d’attribution ont été mises en place pour empêcher les contribuables de transférer artificiellement des revenus à des membres de la famille, en particulier les enfants mineurs, dans le but de réduire leur impôt. Ces règles stipulent que les revenus transférés dans certaines circonstances seront réattribués au contribuable qui a initialement généré ces revenus, ce qui annule l’effet fiscal recherché.

Revenus d’intérêt et de dividendes

Lorsque vous transférez un bien générateur de revenus (comme un compte d’épargne ou des actions) à votre conjoint ou à vos enfants mineurs, les règles d’attribution peuvent s’appliquer. Dans ce cas, les revenus générés par ces biens (comme les intérêts ou les dividendes) vous seront réattribués et vous devrez les inclure dans votre propre déclaration de revenus.

Exemple : Si vous donnez 50 000 $ en actions à votre conjoint, et que ces actions génèrent 2 000 $ de dividendes par an, les 2 000 $ seront réattribués à vous, et vous devrez les inclure dans votre revenu imposable, même si votre conjoint a reçu les dividendes.

Gains en capital

Les règles d’attribution sont moins strictes en ce qui concerne les gains en capital. Si vous transférez un bien générateur de gains en capital (comme des actions ou un bien immobilier) à votre conjoint, les règles d’attribution s’appliqueront aux gains en capital réalisés sur la vente de ce bien. Cela signifie que le gain en capital sera inclus dans votre déclaration de revenus.

Exemple : Vous transférez un portefeuille d’actions à votre conjoint, et votre conjoint vend ces actions un an plus tard, réalisant un gain en capital de 10 000 $. Ce gain en capital vous sera attribué et vous devrez le déclarer dans votre propre déclaration de revenus.

3. Exceptions aux règles d’attribution

Bien que les règles d’attribution limitent certaines stratégies de fractionnement du revenu, il existe des exceptions et des situations où le fractionnement est légalement permis. Voici quelques exemples où le fractionnement peut s’appliquer sans enfreindre les règles d’attribution.

Fractionnement des revenus de retraite

Depuis 2007, le fractionnement des revenus de retraite est permis au Canada. Cela permet à un contribuable de transférer jusqu’à 50 % de ses revenus de retraite admissibles (comme les pensions et les rentes) à son conjoint. Cette stratégie est particulièrement avantageuse lorsque l’un des conjoints est dans une tranche d’imposition plus basse que l’autre.

Exemple : Jean reçoit 60 000 $ par an en pensions de retraite, tandis que son conjoint Marie reçoit 20 000 $. En fractionnant 30 000 $ de ses revenus de retraite avec Marie, ils peuvent réduire leur impôt total, car une plus grande partie des revenus sera imposée à un taux inférieur.

Paiements de pension alimentaire

Les paiements de pension alimentaire effectués pour un ex-conjoint sont déductibles pour celui qui les paie et imposables pour celui qui les reçoit. Cela peut constituer une forme de fractionnement de revenu si l’ex-conjoint est dans une tranche d’imposition plus basse.

Prêts à taux prescrit

Le fractionnement du revenu peut également être réalisé légalement en utilisant un prêt à taux prescrit. Cette stratégie consiste à prêter de l’argent à un membre de la famille (généralement un conjoint ou un enfant adulte) à un taux d’intérêt fixé par l’ARC (qui est souvent bas). Les revenus générés par l’argent prêté seront imposés au taux du membre de la famille emprunteur, plutôt qu’au taux du prêteur.

Exemple : Marc prête 100 000 $ à son conjoint Sophie à un taux prescrit de 2 %. Sophie investit cet argent dans des actions et génère un rendement de 8 000 $. Elle paiera de l’impôt sur ce revenu, tandis que Marc n’aura qu’à déclarer les intérêts du prêt (2 %).

4. Stratégies légales de fractionnement du revenu

Bien que les règles d’attribution limitent les possibilités de fractionnement, plusieurs stratégies légales peuvent être utilisées pour réduire l’impôt familial global :

  • Fractionnement avec des enfants adultes : Les règles d’attribution ne s’appliquent pas aux transferts de biens à des enfants adultes (âgés de 18 ans ou plus). Si vous transférez des biens générateurs de revenus à vos enfants adultes, les revenus générés leur seront attribués et seront imposés à leur propre taux.
  • Fonds communs familiaux : Si votre famille gère un portefeuille d’investissements commun, vous pouvez utiliser un compte conjoint pour répartir les revenus d’investissement entre les membres de la famille en fonction de leur taux d’imposition.
  • Constitution d’une fiducie familiale : Une fiducie familiale permet de transférer des biens et des revenus à des bénéficiaires (souvent des enfants ou des petits-enfants) tout en minimisant l’impôt. Les règles entourant les fiducies sont complexes, il est donc recommandé de consulter un professionnel fiscal avant de mettre en place cette stratégie.

5. Les pièges à éviter dans le fractionnement du revenu

Bien que le fractionnement du revenu puisse offrir des avantages fiscaux considérables, il est important d’éviter certains pièges :

  • Fractionnement avec des enfants mineurs : Le fractionnement du revenu avec des enfants mineurs est limité par les règles d’attribution et la “taxe sur le revenu fractionné” (TOSI), qui impose à des taux élevés les revenus transférés à des enfants mineurs.
  • Non-conformité avec les règles d’attribution : Il est essentiel de bien comprendre les règles d’attribution pour éviter les pénalités et les réattributions de revenus. Travailler avec un conseiller fiscal vous aidera à mettre en place des stratégies légales de fractionnement du revenu.

Le fractionnement du revenu est une stratégie puissante pour réduire l’impôt familial, mais elle est encadrée par des règles complexes, notamment les règles d’attribution. En planifiant correctement et en utilisant des stratégies légales, il est possible de maximiser les économies d’impôt tout en respectant la législation fiscale. Si vous avez des questions sur le fractionnement du revenu ou sur la meilleure façon de structurer vos finances familiales, EB Conseil Fiscal est là pour vous accompagner et vous offrir des conseils adaptés à votre situation.